samedi 31 août 2024

« Plus je parle, moins ils travaillent »


« Je voudrais dire ici quelques secrets du métier. Ceux que personne n’a osé me révéler à mes débuts et dont la méconnaissance fit que le travail de prof m’a paru alors particulièrement lourd à exercer. Des secrets qui m’ont été précieux et qui ont marché pour moi. Je ne peux cependant garantir l’universalité de leur usage et affirmer qu’ils sont indispensables à tous ceux et celles qui feront la classe au quotidien.
Le premier secret : ne pas faire cours!
Pas tout le temps, pas systématiquement comme trop souvent on fait. On peut arrêter de faire toujours cours et se reposer un peu.
Comment ? En prenant appui sur le formidable réservoir d’énergie potentielle des élèves. En faisant comme en randori au judo quand on s’entraîne au combat : on utilise la force et la souplesse des partenaires (et non adversaires…) pour les entraîner dans le mouvement même de tout apprentissage (et non pour les mettre ippon sur tatami…) ; […] Ne pas puiser dans cette fontaine de jouvence et d’énergie peut conduire à une déperdition rapide du plaisir d’enseigner, et la carrière peut se terminer, quelque quarante annuités plus tard, par une grosse fatigue existentielle…
En arrêtant donc un peu de pratiquer le cours magistral, on parie sur leur éducabilité active, sur leur capacité à se mobiliser quand on les tire de la passivité où ils sont plongés habituellement
Car on découvre bien vite que le métier de prof est particulièrement fatigant : lourdeur des effectifs, services et horaires impossibles, paquets de copies toujours à corriger, équipements insuffisants ou défectueux, discipline à assurer sans faille, réunions, conseils, etc. Mais il y a autre chose aussi. Quiconque n’a jamais eu à faire la classe au quotidien, ou qui l’a oublié, ne peut comprendre ce qu’est l’entropie pédagogique qui mesure le prix énergétique à payer à chaque nouvelle heure de cours pour mettre le système-classe en mouvement. […] C’est la raison pour laquelle on sort parfois vidé de trois ou quatre heures de cours consécutifs. On ne saurait en faire guère plus de six par jour et il serait difficile de nous imposer, comme à d’autres travailleurs, 35 ou 39 heures par semaine, RTT comprise.
Quand j’ai constaté ainsi sur moi-même cette déperdition entropique d’énergie, je me suis souvenu d’une formule que m’avait communiquée un maître nonchalant mais perspicace : wP x wE = constante. 
Traduction : le produit des efforts du professeur par ceux de l’élève est une constante énergétique. Il s’ensuit que plus le prof travaille moins l’élève apprend. L’inverse est également vrai. »

Ce long extrait provient d’un texte écrit par Raoul Pantanella dans les Cahiers Pédagogiques n° 406 de septembre 2002 dans le dossier “Faire la classe au quotidien. S'il n'est plus disponible sur le site des Cahiers Pédagogiques, on peut le trouver dans les bibliothèques et en fichier sur quelques sites de partage 

La formulation de ce que j’avais qualifié par amitié de  « théorème de Raoul » et le titre de l’article (« plus je parle moins ils travaillent ») m’avaient interpellé à l’époque et je n’ai cessé depuis d’y faire référence. 

C’est, à mon sens, un bon point de départ pour questionner  le poids du cours magistral et notre appétence pour cette pédagogie frontale mais aussi pour s’interroger sur les conceptions de l’apprentissage. Et puis, et ce n’est pas rien, c’est aussi un guide de survie pour durer dans l’enseignement. 

Pourquoi le cours magistral ? 

Une anecdote pour commencer. Vers l’âge de 9-10 ans, mes parents nous ont emmenés, ma petite sœur et moi, visiter les châteaux de la Loire. J’avais beaucoup aimé. Revenu à la maison, un jour que l’on me demandait ce que je voulais faire plus tard, j’avais répondu sans hésiter “guide de château”. Pourquoi ? « Car, le monsieur frappe dans ses mains, tout le monde se regroupe autour de lui et vient l’écouter ! »

Depuis, je suis devenu enseignant ! Mais j’ai aussi compris assez vite que ce n’était pas aussi facile que ça et surtout que ce n’était pas la garantie pour que les élèves apprennent et retiennent. 

Extrait de la BD "les Profs"


Je crois qu’il y a une composante narcissique forte dans le désir de devenir enseignant. Beaucoup souhaitent “ être au centre” pour être écoutés. Je ne faisais pas exception à la règle. Mais il importe de déconstruire cette appétence pour le cours magistral qui est  aussi le produit des représentations que l’on a du métier et qui sont celles que l’on retrouve dans la culture populaire (le cinéma, la bande dessinée, etc.) 

Même si les pratiques évoluent, notamment dans l’enseignement primaire, le modèle dominant reste celui du cours magistral et notre tradition scolaire, c’est un enseignant, seul, face à une classe. C’est pour cela qu’on parle aussi de « pédagogie frontale ». 

Il y a dix ans l’enquête Talis sur l’enseignement, publiée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), montrait la prégnance, en France, de cette pédagogie « verticale ».  Moins qu’ailleurs, les enseignants français travaillent collectivement. Moins qu’ailleurs, ils font travailler leurs élèves en petits groupes (37 % disent le faire), moins qu’ailleurs, ils lancent des projets d’au moins une semaine (24 %) ou utilisent des outils numériques (22 %). Une minorité affirme différencier sa pédagogie selon le niveau des élèves (22 %).

Si on a eu quelques enseignants passionnants qui vous captivaient par la puissance de leur verbe, si « Le cercle des poètes disparus » montre un professeur charismatique qui  fait rêver (pas moi…), on sait bien aussi que ce modèle trouve vite ses limites. Qu’avons nous retenu ? Comment a t-on réellement appris ? Ce n’est pas forcément dans le face à face que nous sommes le plus efficace.

Attention ! Mon propos n’est pas de dire qu’il  faudrait bannir le cours magistral. Je ne le dis pas (et Raoul non plus !). Mais il ne faut pas le considérer comme la modalité ultime de la forme scolaire et s’interroger sur son efficacité et le replacer parmi un éventail de possibilités pédagogiques. Autrement dit c’est à consommer avec modération 


Comment apprend t-on ?

Il est évidemment difficile de résumer en quelques phrases des approches théoriques qui ont donné lieu à de longs développements. On peut cependant tenter de résumer la diversité des approches des conceptions de l’apprentissage et des pratiques d’enseignement en quelques grands courants.



• « La connaissance se transmet »

La conception traditionnelle des apprentissages repose sur l’idée qu’on apprend par le simple fait de recevoir des informations, par « imprégnation ». La métaphore souvent utilisée est celle du vase que l’on remplit. Pour apprendre, il suffirait alors d’avoir des élèves attentifs, motivés capables de mémoriser intelligemment. Dans une telle logique, le cours magistral est la méthode principale d’enseignement.

• « La connaissance s’acquiert »

C’est ainsi qu’on pourrait résumer le modèle behavioriste. Ce modèle repose sur la définition de connaissances à acquérir en termes de comportements observables et l’apprentissage résulte alors d’une suite de conditionnements par la répétition et de renforcements. La pédagogie par objectifs se situe dans cette logique avec des micro-objectifs et des consignes précises appliquées à des séries d’exercices.

• « La connaissance se construit »

Dans ce modèle, la connaissance ne se transmet pas verbalement, elle doit être nécessairement construite et reconstruite par celui qui apprend. Et cette reconstruction se fait dans l’interaction et la confrontation avec les autres. C’est d’ailleurs pour cela que l’on parle de socio-constructivisme. L’enseignant, dans cette perspective, a un rôle de « facilitateur des apprentissages », de « médiateur » (Vygotski). Il crée des situations problèmes qui vont permettre à l’élève d’être acteur dans la construction de ses connaissances et compétences.

Les travaux des neuroscientifiques vont dans le même sens. Stanislas Dehaene dans un article intitulé « les quatre piliers de l’apprentissage » détaille les principaux apports des neurosciences dans la compréhension de l’acte d’apprendre. Parmi ceux-ci, il insiste sur l’engagement actif en rappelant ce qu’ont dit avant lui les grands pédagogues : on apprend mieux quand on est impliqué et motivé et qu’on est acteur et pas seulement “spectateur” ! 

« J’entends et j’oublie, Je vois et je me souviens, Je fais et je comprends. » nous dit la sagesse populaire (ou Confucius...) Ces trois conceptions de l’apprentissage ne sont pas exclusives l’une de l’autre. La répétition est une excellente méthode pour intégrer un certain de nombre de connaissances et surtout de compétences. Répéter les verbes irréguliers, ça marche. Faire et refaire la même procédure, aussi. 

Installer et conserver un moment magistral en cours est aussi très utile pour « fixer » ce qui a été appris durant l’activité. On parle alors d’ « institutionnaliser les savoirs ». 

Il peut donc y avoir complémentarité entre ces trois approches. 

L’enjeu n’est pas seulement de transmettre des connaissances, mais de s’assurer qu’elles sont acquises durablement et efficacement par les élèves. Les enseignants doivent être des spécialistes du « faire apprendre » plus que de simples « transmetteurs ». 

Pour cela, nous devons varier les situations d’apprentissage. La pédagogie ne se limite pas au cours magistral mais englobe et intégre les situations suscitant la réflexion collective et la coopération des élèves. 

Faire travailler la classe par groupes apporte toujours un regard nouveau sur les élèves. On peut les découvrir très différents avec quelquefois de réelles surprises. Car pour l’enseignant, c’est l’occasion d’observer la façon dont l’apprentissage se construit, les obstacles auxquels sont confrontés les élèves et de passer, selon la jolie formule de Philippe Meirieu, d’une pédagogie du « face à face » à une pédagogie du « côte à côte ». La surprise est souvent aussi positive en découvrant des raisonnements beaucoup plus élaborés que nous ne le pensions, ou des compétences insoupçonnées car peu mises en valeur dans la forme d’enseignement traditionnel.


Guide de survie

Revenons à cette phrase qui nous sert de fil conducteur.. Si, comme nous avons essayé de le montrer, l’essentiel de ce qu’il faut en retenir est l’importance de l’activité dans l’apprentissage, il y a aussi dans ce que nous dit l’ami Raoul un conseil pour survivre et durer dans ce métier. 

Tenir tout le cours sur ses épaules, « assurer le show »,  c’est épuisant… et même ennuyeux. 

Même si elle est différente de celle qu’on éprouve alors, il peut y avoir aussi une grande satisfaction à prévoir un dispositif, une activité et de la voir se dérouler comme on l’avait prévu. Cela demande un travail en amont qui est important mais qui peut être capitalisé d’une année sur l’autre. C’est aussi l’occasion de travailler avec d’autres et de mutualiser et ainsi de rompre l’isolement trop souvent présent dans ce foutu métier. 

L’ennui nait de l’uniformité, dit-on. Cela s’applique particulièrement aux mécanismes de l’apprentissage et au travail enseignant. Mais varier les méthodes les temps et les activités, est non seulement un enjeu pour ne pas s’ennuyer mais aussi une nécessité pour s’adapter à des élèves tous différents. 

Au fur et à mesure, avec l’expérience, les essais et les erreurs, vous verrez mieux ce qui marche et les conditions à réunir. Vous verrez mieux aussi les ressorts qu’il faut activer pour les motiver et susciter le désir d’apprendre et « la saveur des savoirs ». 

Vous trouverez votre style d’enseignement, comme le dit en conclusion Raoul Pantanella : «Un dernier mot avant que d’aller faire cours : si l’essentiel est d’aimer suffisamment les élèves et l’univers passionnant de la jeunesse toujours recommencée, je reste persuadé que seule une pédagogie adaptée par chacun à sa personnalité permet de vivre heureux dans ses classes, toute une vie de prof. On a des chances alors d’avoir découvert la pédagogie au long cours pour faire la classe au quotidien.»


Cet article accompagne la vidéo éponyme qui se trouve sur la chaîne Teachschnock sur Youtube

Philippe Watrelot




 

lundi 26 août 2024

A propos de l'autorité éducative

 Ce texte accompagne la vidéo de la chaine Teachschnock sur YouTube

 






 

Pendant plusieurs années à l’IUFM/ESPÉ/INSPÉ j’ai animé des séances de formation consacrées à la “gestion de classe”. Au cours des années, le titre a changé et c’est d’ailleurs assez révélateur de l’évolution de la conception. On est passé de “tenue de classe” à “gestion de classe” puis à “gestion de classe et climat scolaire”. Le terme de “tenue de classe” m’a toujours mis mal à l’aise avec ce qu’il sous-entendait de rapport de forces et de “domptage”. La “gestion” renvoie à un vocabulaire plus technique et nous permet d’insister sur l’aspect systémique et l’existence de “ressources”. Le rajout du terme “climat scolaire” nous rappelle heureusement que tout cela s’inscrit dans une logique de construction collective. 

Mais derrière la question de la gestion de classe, un mot arrive rapidement : “Autorité”. C’est la question qui vient très vite chez les enseignants débutants (jeunes ou moins jeunes et à tout niveau) : aurais-je assez d’autorité pour m’imposer ? Comment construire mon autorité ?

 

Clichés, lieux communs et serpents de mer

Lorsque j’évoquais ces séances de formation auprès de personnes hors de l’école, les réactions étaient très diverses. Ironique : “Tu leur fais des cours d’auto-défense ?”, Péremptoire : “De toutes façons, l’autorité est naturelle, on l’a ou on l’a pas…”. Mais même parmi les collègues, les réactions étaient très tranchées : “ne jamais sourire avant Noël”, “On n’est pas là pour négocier”, “ce qui est le plus important c’est de bien maîtriser sa discipline”. Et chacun d’y aller de son conseil et de “la” méthode infaillible.

C’est d’ailleurs sur cette base qu’étaient nées ces formations il y a une quinzaine d’années avec un enseignant médiatisé qui avait réussi à imposer une démarche auprès de l’administration centrale de l’éducation nationale. Un DVD avait été produit où notamment ce jeune collègue indiquait que, si on mettait deux doigts sur la table, cela permettait d’arrêter les bavardages et de renforcer son autorité. Cette séquence a beaucoup été moquée. On la retrouve dans le film de Thomas Lilti « Un métier sérieux ». Mais le réalisateur a été obligé de la retourner avec un comédien car, curieusement, ce fameux DVD est aujourd’hui introuvable... !

S’il suffisait d’un geste pour avoir de l’autorité ça se saurait ! Ceux qui ont également un avis sur l’autorité ce sont les politiques et les éditorialistes. On ne compte plus les Unes des journaux sur son déclin et les discours politiques sur la restauration de celle ci. Le déclinisme et la démagogie prospèrent...

 

 

Définir l’autorité

Nous allons essayer de sortir de ces débats biaisés pour nous donner des outils pour penser notre métier et définir l’autorité 

La notion est complexe et polysémique. Si on s’en tient à une définition classique, l’autorité est le pouvoir d’obtenir, sans recours à la contrainte physique, un certain comportement de la part de ceux qui lui sont soumis. En excluant l’intervention de la force, on la distingue de la notion de pouvoir. C’est ce que souligne cette définition de Gérard Mendel (1971) : « L’autorité est le pouvoir d’obtenir quelque chose de l’autre sans avoir à se justifier et sans le recours à la force »

Fort heureusement, les enseignants n’utilisent pas la violence pour se faire obéir et pour faire faire aux élèves ce qu’ils veulent qu’ils fassent. Sur quoi repose alors l’obéissance ? Sur la légitimité que les élèves leur reconnaissent.

Max. Weber distinguait ainsi trois types idéaux d'autorité et de légitimité:

-       L'autorité traditionnelle trouve sa légitimité dans la tradition. On respecte les règles et ceux qui les incarnent parce qu’il en a toujours été ainsi...  

-       L'autorité charismatique trouve sa légitimité dans la personnalité de celui qui l’incarne et l’emprise qu’il provoque.  

-       L'autorité légale-rationnelle est, selon Weber, celle qui caractérise la modernité. Elle est inscrite dans le droit civil ou administratif et est légitimée par la complexité de la division du travail dans une société telle que la nôtre. En d’autres termes, on obéit parce qu’on évolue dans une institution qui a défini des règles auxquelles on se conforme et que les acteurs de cette institution sont supposés avoir des compétences qui les rendent légitimes pour obtenir cette obéissance.  

Si on s’en tient à cette typologie, l’autorité dans l’Éducation Nationale relève donc surtout de la dernière catégorie. Mais l’autorité charismatique constitue aussi un idéal ou un fantasme pour beaucoup (cf. l’autorité naturelle).

On peut nuancer la définition de Gérard Mendel sur un autre point. Celui ci indique, en reprenant Hannah Arendt, que l’individu qui obtient l’obéissance le fait « sans avoir à se justifier ». Dans le domaine pédagogique c’est très discutable. On peut aussi obtenir l’adhésion par l’argumentation et la justification même si celle ci a ses limites. On se conforme mieux aux règles si on les a comprises et même pourquoi pas négociées...

 Par cette nuance on peut aussi établir une distinction entre l’autorité et l’autoritarisme qui en est une dérive et une perversion.

 

 

L’autorité éducative

Bruno Robbes dans ses travaux sur l’autorité éducative présente l’autorité éducative avec l’aide de trois verbes :

-       “Etre l’autorité”

-       “Avoir de l’autorité”

-       “Faire autorité”

Cette distinction permet de distinguer l’autorité qui provient du statut (“être”), de la compétence acquise (“avoir”) et celle qui est liée à l’auteur lui même : l’autorité qui autorise, qui augmente . Pour reprendre les termes mêmes de Bruno Robbes : « Avoir de l’autorité en tant que personne, c’est avoir cette confiance suffisante en soi, c’est être suffisamment maître de sa propre vie pour accepter de se confronter à l’autre avec son savoir et ses manques. […] Rien de naturel dans cette autorité là : c’est par des actes posés tout au long d’une vie que le sujet s’autorise progressivement à assumer un statut, reconnu par la mise en œuvre de savoirs qu’il continue à développer. »

 

Autrement dit l’autorité n’est pas ici seulement une autorité qui contraint mais aussi une autorité qui permet à l’élève d’évoluer : « je suis suffisamment conscient de mon autorité que je te permets d’être autonome dans un cadre que j’ai fixé ». Et cette autorité me vient des compétences et des savoirs que j’ai construits. Et les élèves reconnaissent ces compétences. Le maître est le maître parce qu’il sait ce qu’il fait et qu’il sait où il va et qu’il a confiance dans ma capacité à progresser et apprendre. Ce que Michel Serres appelle “la présomption de compétence”

 

Bien loin de ceux qui conseillent de ne pas sourire avant Noël (NSBC : never smile before Christmasdisent les anglo-saxons)  le sourire, la bienveillance peuvent aussi contribuer à l'autorité, la vraie, celle qui autorise... Lorsqu'on se déguise, qu'on joue un rôle, les élèves le voient et ressentent votre posture (au sens éthologique du terme) comme une défense et donc une crainte.

Assumer ce que l'on est, faire preuve d'humour, "lâcher prise", être souriant, c'est aussi dire inconsciemment aux élèves : “regardez, je suis à l'aise, je n'ai pas peur de vous, on peut faire alliance” et c'est aussi donc indirectement marquer son autorité.

Pour ma part, j'utilisais beaucoup l'humour en classe (et pas l'ironie, même si ça peut m'échapper) et les élèves se disaient (du moins je l'imagine) qu'un type qui est capable de faire ça en classe, est à l'aise et maîtrise les choses. Et on peut alors avancer dans les apprentissages.

Cela ne m'empêche pas bien au contraire d'être garant du “cadre” et donc de rappeler les limites afin de garantir à chacun (y compris contre soi même) qu'il puisse bien y avoir la possibilité d'apprendre.

Après (ou avant plutôt…), bien sûr, il faut maîtriser les contenus. Si vous n'êtes pas à l'aise sur les contenus que vous enseignez, cela va se voir presque physiquement. En revanche si vous les maîtrisez, vous serez plus à l’aise y compris dans votre posture et vous autoriserez plus facilement  à sortir du contrôle et à laisser de la place aux élèves. Les problèmes de discipline sont donc aussi des problèmes de discipline (scolaire) mais ils ne sont pas que cela. Il ne suffit pas de maîtriser les savoirs savants et scolaires pour être un bon enseignant. Il faut aussi avoir réfléchi à son rôle et aux questions d’autorité.

 

C’est l’objectif de ce blog et de cette chaine vidéo de vous proposer des outils d’analyse pour penser son métier. Nous poursuivrons la réflexion surtout ces sujets dans de prochaines chroniques. 

 

PhW

 

 

Quelques références sur l’autorité éducative

 

Cahiers Pédagogiques n° 557 (décembre 2019) L’autorité éducative

 

Bruno Robbes L’autorité éducative dans la classe ESF-Sciences Humaines 2020

 

EduBref n°20 mai 2024 L’autorité éducative Institut Français de l’ Éducation

 

Philippe Watrelot Autorité et gestion de classe : quelques points de repère Blog Chronique Éducation

To be or not to be…


 

Une de mes phrases préférées pour définir l’activité de l’enseignant nous vient du sociologue de l’éducation Philippe Perrenoud   “Agir dans l'urgence, décider dans l’incertitude”  est le titre d’un de ses livres paru en 1996. 

Elle permet de mettre l’accent sur une des difficultés de ce métier où l’on a à résoudre un très grand nombre de problèmes et répondre à beaucoup de questions dans un temps très dense et limité ! 

Certaines de ces décisions peuvent engager ensuite toute l’année. Cela peut être le cas pour des questions d’organisation ou de pédagogie qu’on n’avait pas prévues ou encore pour des réactions à des comportements ou des interrogations d’élèves. Une erreur peut ensuite être difficile à rattraper et avoir même des conséquences négatives sur le climat de la classe. 

 



Enseigner ce n’est donc pas seulement préparer ses cours mais aussi « se préparer ». Cela signifie qu’il faut prévoir tous les aspects d’une organisation et les choix pédagogiques y compris les plus triviaux (matériel, disposition de la classe, temps...) mais aussi anticiper les réactions des élèves et les éventuels problèmes et conflits qui peuvent se poser. 



Bien sûr, tout n’est pas prévisible et, à l’inverse, ce sur quoi vous avez réfléchi peut très bien ne pas se produire. Le pire n'est jamais sûr !

 

Nous reviendrons dans un autre billet sur la gestion des conflits et incidents. Pour les problèmes d’organisation, il existe de très nombreux pense-bêtes et autres todo-lists. Dans les organismes de formation (INSPE et écoles académiques), les formateurs ne manqueront pas de vous sensibiliser à tous ces éléments qui deviennent évidents et familiers au fur et à mesure que l’on prend de l’expérience. Et les personnes expérimentées sont d’ailleurs une des ressources principales qu’il ne faut pas hésiter à solliciter si on débute sans être formé (vacataires).

 




Un petit truc utilisé en formation peut être bien utile, c’est la méthode de « l’instruction au sosie ». Le point de départ relève presque d’un argument de science-fiction : « imaginez que vous avez la possibilité d’être remplacé demain à votre travail par un clone, un sosie mais qui n’a pas votre expérience. Avant de l’envoyer à votre place, il faut donc lui donner des instructions extrêmement précises pour qu’on ne se rende pas compte de la supercherie  ». Cette méthode est très formatrice parce qu’elle oblige à rendre explicite ce qui est quelquefois réalisé de manière implicite et presque “mécanique” tant cela a été intégré. Dans le dialogue cela permet aussi de justifier ses choix et cette masse de micro-décisions que l’on prend dans sa pratique quotidienne. 


Cette méthode n’est pas seulement utile pour la formation initiale. Elle l’est aussi en formation continue lorsqu’on veut questionner ses pratiques et les confronter à d’autres. 

 

Justifier ses choix est important. L’enseignant expérimenté peut être tenté, dans une logique de “compagnonnage” de présenter sa manière de faire comme la seule valable : « observe et fais comme moi ... » (et pas autrement ?). La justification est utile pour faire son choix en connaissance de cause et peser les avantages et inconvénients

Vous pouvez aussi procéder en faisant un petit tableau comparatif pour quelques uns des choix à faire. En voici quelques uns : tutoyer ou vouvoyer les élèves ? les appeler par leur nom ou leur prénom ? les laisser se placer comme ils veulent ou leur donner une place fixe ? quelle disposition de classe ? Travail à la maison ou pas ? interroger nominativement ou à la cantonande ? la liste peut être très longue et est à compléter par vos lectures et surtout vos échanges. 

 

Pour quelques unes de ces questions, les réponses sont évidemment différentes selon qu’on évolue au Primaire ou au Secondaire (collège ou lycée). Ces réponses peuvent être aussi données par le règlement intérieur de l’établissement (gestion des retards, régime des sanctions,…) ou par la “culture” de l’établissement. 

 


 Un exemple de liste extraite d'un ouvrage auquel j'ai participé..


Cet article complète la vidéo éponyme sur la chaine Teachschnock 






Première(s) séance(s)


 

Ce qui caractérise le métier d’enseignant c’est qu’on débute chaque année… Chaque classe est différente et tous les ans, comme disent les sportifs, on « remet son titre en jeu ». Les conseils qui suivent ont plus d’importance pour ceux qui démarrent vraiment mais sachez que tout le monde (sauf quelques inconscients ou j’menfoutistes) a une petite appréhension le jour de la rentrée. C’est normal !

La première séance est en effet importante car elle pose les bases de la relation que vous allez avoir avec les élèves tout au long de l’année. Par les paroles dites mais aussi toute la communication non-verbale (voix, posture, gestes, habillement, …), vous adressez des messages. Bien souvent c’est plus la manière dont les choses sont dites qui compte que ce qui sera dit vraiment !

Toutefois, il ne faudrait pas non plus conclure que « tout est joué » avec la première séance. De la même façon qu’on ne juge pas quelqu’un dès le premier regard, la relation avec une classe se construit dans une certaine durée.

 

Bonjour,….

Comme on l’a dit, il est normal d’avoir un peu peur. Pour autant, ne restez pas le nez dans vos notes, regardez les élèves.


Présentez-vous bien sûr donnez votre nom et votre prénom. Pas la peine d’en dire plus et de dérouler votre CV et vos diplômes. Il n’est pas utile, si vous l’êtes, de dire que vous débutez ou de mentionner que vous êtes stagiaire dès maintenant, vous aurez l’occasion d’y revenir avant les premières « visites ». Vous êtes simplement leur professeur et si vous êtes nommé c’est que vous êtes légitime !

Vos élèves sont de vrais élèves et vous, vous êtes un vrai prof.

À ce titre, c’est à vous qu’il revient de fixer le cadre dans la classe et de le faire respecter. C’est ce que les élèves et même l’institution attendent de vous. Ce cadre doit être clair, explicable et constant, c’est la condition d’une classe qui se passe bien. Nous y reviendrons.

 

Les élèves sont attentifs aux aspects extérieurs, à la présentation de soi. Pensez-y ! Dans le métier il n’y a (heureusement) pas de tenue imposée, mais il peut y avoir, dans ce domaine comme dans bien d’autres, des « cultures d’établissement ». Ne vous “déguisez“ pas pour autant, il faut que vous soyez à l’aise.

La communication n’est pas que verbale : la gestuelle, la voix (débit, intonation, intensité…) comptent. Pensez à votre « entrée en scène » ! 

Ne restez pas non plus assis derrière votre bureau, il faut occuper l’espace de la classe. Bougez !

 

Prenez une fiche… ?

Faut-il faire remplir des fiches de renseignement aux élèves ? C’est un choix à faire Personnellement je pense que c’est une perte de temps et une forme de procrastination pour les enseignants. On s’aperçoit que la plupart des renseignements demandés sont accessibles facilement auprès du CPE… Il peut y avoir aussi un effet pervers avec des questions quelquefois très intrusives mal ressenties par les élèves (c’était mon cas !) et qui peuvent conduire à étiqueter les élèves et influencer l’opinion de l’enseignant et même son évaluation. C’est ce qu’on appelle « l’effet de halo » et c’est particulièrement bien montré par le sociologue Pierre Merle

 

 

Faire connaissance

En tous cas, il est essentiel d’apprendre le plus vite possible le nom et le prénom des élèves. Lorsqu’on fait l’appel, faites attention à l’orthographe et la prononciation des noms de familles. N’hésitez pas à demander aux élèves de vous corriger si vous prononcez mal. Il y sont très sensibles. 

On peut commencer par exemple en leur demandant au début de dire à chaque fois qu’ils ont la parole “je m’appelle X”, ou en leur demandant d’avoir un panonceau avec leur prénom posé sur la table. Il peut être aussi intéressant de faire se présenter les élèves les uns par les autres. 

Il peut être utile d’avoir des photos. Dans le secondaire, parfois le professeur principal réalise un trombinoscope. C’est évidemment plus facile à mémoriser dans le primaire

Il existe de nombreux dispositifs « brise-glace » pour permettre aux élèves de mieux faire connaissance, ils sont différents selon les niveaux (maternelle, élémentaire, collège, lycée…) et peuvent prendre plus ou moins de temps. Un des dispositifs les plus simples (et un de mes préférés) est une "présentation croisée". Ça marche quel que soit le contexte et le niveau. Chaque élève va à la rencontre d'un autre élève qu'il ne connait pas encore, et entame une sorte de speed dating à durée limitée (je leur dis 2 minutes, mais en laisse généralement davantage). Je donne souvent une contrainte (une question particulière, une souhait, un objectif…). Chaque élève va donc ensuite présenter brièvement son binôme ce qui lui permet de prendre la parole de manière moins engageante que si c’était pour soi-même. 

 

 

Installer

Un des en enjeux de ces premières séances est d’installer le cadre de travail et de vie qui va être celui de l’année. Il s’agit de « perdre » un peu de temps pour en gagner ensuite. 

Outre le retour sur le règlement intérieur de l’établissement, on peut aussi consacrer un peu de temps à revenir sur les règles de vie que vous allez instituer dans la classe et vos méthodes de travail. Dire ce que l’on va faire et faire ce que l’on a dit est une exigence de  clarté du fonctionnement et de respect vis à vis des élèves. C’est pourquoi il faut toujours annoncer les règles que l’on va suivre (sans se donner trop de contraintes non plus, évitez les interminables règlement de la classe…)  et s’y tenir.

Les élèves apprécieront cette “prévisibilité” mais… s’empresseront dans le même temps de la tester… !

D’une  manière générale, il est important de donner aux élèves des repères . Ceux ci peuvent prendre la forme d’objectifs énoncés ou de plan du cours et rappelés aux tableaux. mais cela peut être aussi un ensemble de rituels qui structurent l’entrée en cours et son déroulement : comment on rentre en classe, comment on distribue la parole, qu’est ce qu’on fait pour résumer ce qu’on a appris, comment on finit une séance… 

 

 

Commencer ! 

Il y a (souvent, pas toujours) chez les enseignants, une tendance à reculer le moment de s’y mettre vraiment... Bien sûr c’est utile de présenter les programmes, les objectifs, les méthodes, mais n’y perdons pas trop de temps !

Le meilleur moyen de se présenter et d’installer le cadre et les méthodes, c’est de commencer ! C’est ainsi que les élèves découvriront le mieux qui vous êtes, vos méthodes et vos principes. On prouve le mouvement en marchant.

Pour démarrer l’année, on peut passer par une évaluation diagnostique, c’est-à-dire une évaluation des acquis de l’année passée, de ce qu’ils savent et de ce qu’ils ont oublié... La machine ÉducNat prévoit des évaluations très normées mais ici, il ne s’agit pas de cela mais simplement de quelques exercices (non notés évidemment) qui permettront de mesurer les savoirs et les savoir-faire. 

Ce type de démarrage permet de montrer aux élèves qu’ils savent des choses mais aussi de mieux les connaitre et de repérer déjà les difficultés. Evidemment ce point de départ doit être exploité ensuite dès les premiers cours. 

 


 

Quelques références utiles

 

Que faire la première heure ? (conseils d’internautes pour les Cahiers Pédagogiques)

 

Quelques conseils pour bien débuter – Les Cahiers Pédagogiques le 1er septembre 2021

 

« Ressources pour débuter », Hors-série numérique n° 47, novembre 2017 (en téléchargement gratuit)

 

Bien débuter dans le 1er degré – vidéo Cahiers Pédagogiques

 

Bien débuter dans le 2nd degré – vidéo Cahiers Pédagogiques

 

François Muller Manuel de survie à l’usage de l’enseignant (même débutant), L’étudiant, 2019

 

 

Audrey Murillo Prendre un bon départ dans ses classes, Les pratiques des premiers jours en questions  ESF-Sciences Humaines 2021


Bonne rentrée !

 

Philippe Watrelot


 Cet article complète la vidéo éponyme sur la chaine YouTube 

 






 

vendredi 23 août 2024

Présentation de la chaîne TeachSchnock

 « Mais qui suis-je pour donner des conseils ? »

C’est la question que je me suis posée longtemps et qui a retardé la mise en œuvre de ce projet de chaine vidéo. Outre la procrastination du retraité, il y a bien sûr une bonne dose de ce « syndrome de l’imposteur » qui ne m’a pas quitté tout au long de ma carrière. Mais il y a surtout une réelle interrogation sur la pertinence de la notion de « conseils » dans le domaine de l’éducation.  

 

Qui suis-je ? 

Mais avant d’aller plus loin dans cette réflexion,  revenons sur le début de ma phrase d’accroche : « qui suis-je ? ». 

C’est toujours délicat de se présenter, d’autant plus à l’heure du numérique où l’Internet garde une trace de tout (ou presque) ce que vous avez dit ou publié. En plus, les réseaux sociaux obligent à produire un profil qui en dit déjà beaucoup. Et puis, si vous êtes arrivé sur cette page, c’est que vous me connaissez déjà un peu ! 

Je ne vais pas dérouler toute ma carrière (il y a Linkedin pour ça…) et encore moins reprendre tout ce que j’ai déjà écrit (voyez mon vieux blog ouvert en 2003 puis le nouveau sur Médiapart ainsi que mes chroniques pour Alternatives Économiques). Vous pouvez aussi me « googler » comme on le fait aujourd’hui ! 

 

Professeur de SES, Formateur en temps partagé à l’INSPÉ aujourd’hui retraité, et toujours militant pédagogique...  Chacune de ces étiquettes peut être pour beaucoup de lecteurs un empêchement à aller plus loin. 

La moins problématique est peut-être celle de « professeur de SES », quoique... Je l’ai été pendant 42 ans et je n’ai donc jamais enseigné au collège et encore moins en Primaire ni dans l’enseignement professionnel. Ceux qui enseignent à ces niveaux peuvent se dire que je ne connais rien à ces terrains spécifiques. De même, ceux qui ne raisonnent que par rapport à leur discipline d’enseignement, peuvent aussi être méfiants. Je fais l’hypothèse qu’au delà des questions spécifiques didactiques, il y a des grandes questions pédagogiques qui se posent à tous les enseignants quels que soient leur matière ou leur niveau d’enseignement.

« Formateur à l’INSPÉ » ! Les clichés et présupposés sont nombreux : hors sol, dogmatiques et/ou refusant de trancher… Tout en ayant conscience de ces critiques, j’ai beaucoup aimé exercer cette activité différente et complémentaire de celle d’enseignant. J’ai essayé de résumer ma vision de ce métier dans un article que je vous invite à lire. Le choix d’être resté seize ans en temps partagé malgré les difficultés d’organisation est en tout cas, un choix personnel, politique et pédagogique pour lever une partie des critiques évoquées plus haut. Le fait d’être « sur le terrain » vous oblige à la modestie et prémunit du dogmatisme.

« Militant pédagogique » peut être aussi un repoussoir pour certains lecteurs qui y liraient à tort un soupçon de dogmatisme et même une menace d’endoctrinement. Ce travers peut exister chez ceux qui sont persuadés d’avoir trouvé LA méthode ou LA solution...Rien de pire et rien de plus faux. J’ai souvent dit que si j’avais des convictions je me gardais bien d’avoir des certitudes. Chaque situation est différente et ce qui convient à l’un ne va pas forcément aller pour un autre. 

Mon « militantisme » se situe surtout au niveau des valeurs. La pédagogie ce n’est pas neutre, ce sont des valeurs mises en action. Je pourrais promouvoir des dispositifs qui favorisent la coopération ou au contraire la compétition, ce ne sont pas les mêmes valeurs et le même choix « politique » (osons le mot)

 

Il y a enfin un dernier qualificatif : « retraité » ! J’ai été « rayé des cadres » le 1er septembre 2022. Et, figurez vous, que c’est parce que je suis à la retraite que j’ai maintenant le temps de faire ce genre de projet ! Vous avez le droit de considérer que je suis dépassé, « has been » (rien que l’utilisation de ce mot montre mon âge...). Je l’assume et je m’en moque en me qualifiant moi même de vieux schnock... Et cette schnockitude ne m’empêche pas de continuer à faire des rêves d’école...

 

 

Donner des « conseils » ?

Si je vous propose ces quelques réflexions, ce n’est pas seulement pour m’occuper parce que j’ai du temps mais surtout parce que l’envie de transmettre et le goût de la pédagogie n’ont pas disparus avec mon départ en retraite. 

J’ai fait allusion plus haut à mon activité de formateur. Celle-ci s’est exercée non seulement à l’IUFM/ESPÉ/INSPÉ mais aussi et d’abord dans le milieu associatif et les mouvements pédagogiques. A chaque fois, j’ai essayé de naviguer entre deux écueils : l’un est celui d’être hyper-prescriptif et l’autre de refuser de donner un conseil au prétexte qu’il faut que chacun « trouve sa propre voie ». 

Pour ma part, j’essaie toujours de donner le choix et de montrer les enjeux de chaque décision. Plutôt que de dire sans cesse « il faut faire comme cela », je tente de montrer ou de faire trouver les avantages et les inconvénients de chacun des choix : « si tu fais comme ça, il y a tels avantages, il faut rassembler telles conditions, et en voici les inconvénients et les dangers… ». Si cela n’interdit pas d’expliquer comment on fait (ou faisait !), cela suppose un peu de nuance et de modestie. 

Plus encore que le conseil qui permet de répondre à une question à un moment précis pour une situation donnée, ce qui est essentiel, me semble t-il, c’est de permettre une démarche d’analyse. Une de mes convictions fortes c’est qu’un « bon » enseignant c’est celui qui pense son métier. Pas quelqu’un qui applique des recettes. 

 

 

Alors finalement, il y a quoi dans cette chaine vidéo ? Et pour qui ?

« C’est bien gentil tout ça, mais qu’est ce qu’il va raconter ce vieux schnock ? »

Des conseils ? Oui ! bien sûr mais  avec modération et précautions sur des sujets qui intéressent tous les enseignants : comment apprendre, l’autorité, sanction, la gestion de classe, l’attention, la mémorisation, les méthodes actives, le travail de groupe, la différenciation… et bien d’autres encore. 

Il y aura aussi des réflexions plus générales sur la pédagogie  qui s’appuieront sur la recherche. Si je suis un praticien et pas un chercheur, je suis cependant un grand lecteur de leurs travaux que j’essaierai de vulgariser. 

Des blagues ? Oui, peut-être… mais surtout une volonté de ne pas se prendre trop au sérieux. 

 

Ces petites vidéos ne sont pas seulement pour les enseignants débutants même si c’est le premier public visé. Je serais très heureux si elles répondaient à des besoins d’auto-formation et que cela s’élargissait à des enseignants plus expérimentés. Dans ce métier, on débute chaque année et « penser son métier » c’est aussi se remettre sans cesse en question. Les vidéos peuvent être l’occasion d’échanges et de débats. 

 

N’hésitez pas à réagir en commentaire de ce texte ou sous les vidéos. Soyez indulgents pour la qualité des images et du montage. Je ne suis pas un vidéaste expérimenté et encore moins un « influenceur ». Attendre que mon niveau s’améliore ne serait qu’une autre forme de procrastination. J’apprendrai au fur et à mesure, en faisant des essais et des erreurs. Comme tout enseignant ! 



Philippe Watrelot 

Rappel 

la chaine vidéo sur YouTube est là : 

https://www.youtube.com/@TeachSchnock